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jeudi 4 août 2011

LM conter

Combien de livres de contes (albums solos et recueils) dans la bibliothèque?
C'est trop fastidieux de compter tous ces contes. Disons un mur, de bonne taille.

De tout temps, l'homme a transmis des contes, des mythes, des légendes. Des histoires qui disent la vie, qui marquent les esprits et qui titillent l'imagination.

Henri Gougaud, grand spécialiste du conte, nous expliquait il y a quelques années:
Depuis les origines, on ne cesse de brasser, de réécrire, de re-raconter les mêmes histoires. Les contes sont des objets libres. Il n'y a pas de texte original signé d'un auteur pour des contes comme Blanche-Neige ou le Petit Poucet. On les considère spontanément comme un bien commun. Tout le monde peut les raconter, d'ailleurs tout le monde les raconte ou les a racontés.Les contes, comme toute littérature digne de ce nom, allument une sorte de feu, de désir de création chez les gens qui les lisent et qui re-racontent alors l'histoire d'une autre manière. 
Selon lui, c'est le nombre quasi infini de versions différentes des contes qui fait leur extraordinaire vitalité.
Il est quand même étrange que ces petites histoires qui n'ont aucune efficacité dans le monde, qui ne véhiculent aucune information, qui sont invraisemblables, qui, pendant des siècles, n'ont même pas été écrites, aient justement traversé les siècles. Comment se fait-il qu'elles aient une telle vitalité alors que tellement d’œuvres réputées incontournables ou immortelles se sont perdues ? Les contes, non ! Justement, à mon avis, parce qu'ils sont sans cesse revitalisés par les gens qui les racontent, différemment de ce qu'ils ont entendu. On vous raconte une histoire, vous allez la raconter, mais pas exactement comme vous l'avez entendue. Elle va passer par votre filtre à vous, par votre propre vie, votre propre manière de ressentir les choses, etc. C'est donc une nouvelle histoire qui est née de celle que vous avez entendue. 
Et il poursuit
Dès qu'une œuvre est adoptée par l'air du temps, par l'esprit populaire, dès qu'elle touche profondément les gens, on en connaît des tas de versions : les Trois Mousquetaires, Notre-Dame de Paris, etc, se déclinent de mille manières. Dans une vision plus large de la littérature, les grands mythes grecs ont aussi été repris : entendus d'abord sur les places publiques par Sophocle, Euripide, Eschyle qui en ont fait des pièces de théâtre, leurs personnages ont été repris tout au long des siècles par des auteurs, Racine et les autres. La Fontaine a exploité les fables d'Esope qui lui-même avait puisé ses histoires dans le folklore, dans les traditions populaires. Toute une tradition littéraire traverse les siècles, les millénaires même, et décline les mêmes histoires de manière différente.
Raconter les contes correspond-il à un besoin ?
C'est la vie, c'est la création même. On dirait que tout se passe comme si, dans les œuvres importantes, dont font partie les contes, il y avait toujours un feu de vie. Un grain de vie qu'on perçoit plus ou moins consciemment et qu'on a naturellement envie de perpétuer. Chaque version d'un conte met au monde quelque chose qui n'y était pas, quelque chose de nouveau. Et c'est justement à cause de ce quelque chose de neuf que vous apportez que celui qui va vous entendre aura lui-même envie de poursuivre l'aventure. Je peux dire sans forfanterie que je connais tous les contes. Ce n'est pas difficile : il n'y en a pas beaucoup, peut-être mille ou deux mille. Mais ce qui est infini, et ce que je ne connais pas bien sûr, ce sont les variantes.

Dans les publications récentes, DEUX RECUEILS ILLUSTRES

Pour les plus jeunes, "Les 15 plus beaux contes pour les enfants", racontés
et illustrés par Tony Ross, chez Gallimard Jeunesse (grand format, 120 p., 13 euros).
On passera sur le titre riquiqui pour se réjouir de ces versions courtes, traduites de l'anglais par Jean-François Ménard.
Dans ce grand livre, on trouve des contes célèbres comme "Les trois petits cochons", "Le Petit chaperon rouge" ou "Boucle d'or", mais aussi des contes moins connus et tout aussi plaisants tels "Le gros navet" ou "Le délicieux porridge". Et bien sûr, les illustrations malicieuses et dynamiques de Tony Ross!





Et pour les plus grands, la bienvenue réédition de l'album des "Contes d'Humahuaca", de Bernard Giraudeau, illustrés par Joëlle Jolivet (2002), chez Seuil-Métailié (56 pages, 13,50 euros). La version audio, lue par Bernard Giraudeau, est toujours disponible en CD chez Naïve.







Bernard Giraudeau, acteur, réalisateur, écrivain et grand voyageur, hélas décédé le 17 juillet 2010, explique dans l'introduction de l'album

Il y a longtemps, j'étais dans les Andes pour un long tournage.
Mes enfants me manquaient. Ils étaient très jeunes.
J'ai voulu leur raconter des histoires. J'ai donc enregistré des contes que j'inventais chaque soir et que je leur faisais parvenir avec les bobines du film. Ils n'étaient destinés qu'à être écoutés et répétés comme le veut la tradition indienne.
Je vous les livre ainsi. Contes à jouer, histoires à raconter.


Ces contes, l'éditrice Anne-Marie Métailié en a eu vent un jour et elle les a confiés à l'illustratrice Joëlle Jolivet. Le premier essai graphique de cette dernière, un peu froid à ses yeux, s'est superbement transformé quand elle a écouté les histoires
 Je ne pouvais plus en faire abstraction
se rappelle-t-elle. Et ses personnages sont devenus beaucoup plus expressifs.

Les contes présentés ici, nés pour l'oralité ou la lecture orale, ont été très légèrement réécrits par l'auteur pour l'album. On y voit voler les ponchos quand se racontent le vent et le sorcier des roseaux du lac Titicaca, quand défilent des animaux fascinants, aux émotions proches de celles des humains, l'âne Gougou et la grenouille Nénette, le pigeon facteur et le condor Kiki, le serpent Sssik et la poule Bianca, sans oublier la truite Grucha Gris.
La musicalité des mots assemblés, le charme et la magie des couleurs, posées avec vigueur, font de ces contes le départ d'un merveilleux voyage dans les Andes.

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