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dimanche 18 décembre 2016

L'indispensable recueil "Ça m'énerve" en poche

Ça m'énerve quand je découvre le chat en train de lécher la graisse de mon foie gras tout juste préparé, histoire de me lancer à temps dans la magie de Noël.

Ça m'énerve, mais pas plus que ça, parce que je viens de relire un seau rempli de nuisances bien énervantes, toujours pirissimes que mes dernières aventures culinaires. Ces contrariétés, énervements et autres nuisances ont été brillamment consignés il y a quelques années par Marie-Ange Guillaume dans un recueil arborant le simple titre de "Ça m'énerve". Et croyez-moi, le récipient est bien plus grand et mieux rempli que la cuve à pop-corn mécaniquement vidée par mon voisin de rangée au cinéma pendant un film silencieux et tragique. Forcément silencieux et tragique.

Chat et fils. (c) 10-18.
Cet indispensable ouvrage paraît enfin en poche, sur beau papier blanc, chez 10-18 (192 pages), mais l'ouvrage original, sorti aux éditions Le Passage en 2012, est toujours disponible (lire ici). A noter, le changement d'illustrateur qui accompagne le changement de format: on passe de Manu Larcenet à Edith Carron, du sombre aux couleurs vives, d'autant que l'illustratrice pose ci et là des dessins bien envoyés entre les chroniques de l'auteure. Les utilisateurs de Facebook retrouveront sur le réseau social la verve dont Marie-Ange Guillaume use régulièrement dans ses nombreux posts à haute valeur humoristique. Comment fait-elle pour résumer l'incongru d'une situation, compiler l’énervement que crée une autre, en quelques mots bien choisis et savamment agencés? Le talent, tout simplement.

"Ça m'énerve" en livre un aperçu impressionnant. Quand Marie-Ange Guillaume explique son projet, cela donne ceci:
"Par pur esprit de vengeance, ce livre traite des nuisances. Pas les nuisances graves, comme la guerre, la mort et les avions qui se cassent la gueule. Non, juste les irritations, les furoncles, les gâchis d'humeur, les casse-couilles en tout genre, les hot-lines, la feuille de laitue décorative piégée dans la sauce, les paperasses et les télécommandes, le principe de précaution, le garçon de café qui met trois plombes à noter votre présence, la housse de couette récalcitrante, la langue de bois, les chasseurs d'éléphants, l'anticyclone coincé au-dessus de Bucarest. En gros, tout ce qui énerve (un peu, beaucoup, parfois énormément) et arrive à vous zigouiller une belle journée qui commençait si bien."

Allons-y donc pour prendre un pinte de bon temps, et se sentir vachement moins seul(e) face aux adversités du destin. Il y en a dans tous les domaines. Le métro parisien bien entendu, le traitement des informations à la télévision, les voisins de train, les déménagements, les enfants des autres, les dialogues entendus ici ou là... Pas de nouvelle chronique dans la nouvelle édition mais ce n'était pas nécessaire. Marie-Ange avait déjà bien repéré tout ce qui allait bien nous enquiquiner encore aujourd'hui. En même temps qu'elle nous partage avec générosité des expériences personnelles qui pourraient être les nôtres.

Exemple: "Cuisinez sans souci, qu'ils disent"
Cuisine sans souci. (c) 10-18.
"Quand j'étais petite, j'invitais fréquemment mon papa (toutes les dix minutes) à goûter mon célèbre gâteau concocté selon ma recette secrète: trois feuilles de marronnier pilées, un asticot découpé en rondelles, une demi-tasse de terre, et une cuiller d'eau. Pas de cuisson. Mon papa mâchouillait la chose - à la réflexion, je me demande s'il ne faisait pas semblant - et me félicitait: "Hmmm... il est bon ton baba au rhum!" Ce qui me contrariait car, dans mon idée, c'était une tarte au chocolat.
J'en suis toujours là. Si je cuisine un veau à la Mérovingienne, on me congratule pour mon lapin à la Fernande. C'est une image: en fait, je n'ai jamais fait de veau à la Mérovingienne. (...)

La suite, savoureuse, est à découvrir dans le livre.
Et pour le foie gras au chat? Le chat au foie gras? J'attends sans m’énerver.







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