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lundi 29 mai 2017

La vie de Junior, jeune Indien Spokane

Chic, un excellent roman pour ados (mais pas que, selon la formule), presque autobiographique, venu des Etats-Unis, nous arrive en réédition (nouvelle collection) presque dix ans après sa sortie en français. Il s'agit du superbe "Le premier qui pleure a perdu", de Sherman Alexie, romancier, nouvelliste et poète amérindien (traduit de l'anglais (américain) par Valérie Le Plouhinec, illustrations de Ellen Forney, Albin Michel Jeunesse, collection "Litt'", 288 pages).

C'est sa vie que Sherman Alexie romance à peine dans "Le premier qui pleure a perdu", son premier roman jeunesse, couronné en 2007 par le National Book Award. Constamment, il balance entre rire et drames, espoir et dépression. Il finit sur la note optimiste qui le caractérise, auteur attentif à son peuple, conscient de ses détresses mais peu déterminé à se laisser faire par le sort et/ou les autres.

Les pages écrites avec naturel montrent la vie d'un Indien Spokane de 14 ans, né dans une réserve. Pauvre, ballotté par le destin dès sa naissance. Chanceux aussi: hydrocéphale, Junior survit à une opération ultrarisquée. Mais il bégaie, zozote, porte des lunettes, est immense pour son âge. Vite surnommé "Gogol", il est sujet aux convulsions et se fait tabasser régulièrement.

Tout au long du livre qui intercale des événements anciens dans la chronologie d'une année, on suit Junior. Le jeune Indien raconte sa vie sans gémir, mais avec l'idée d'échapper à la faim, au désœuvrement et à l'alcoolisme qui mine les siens. Il se rêve même champion de basket.

Junior, qui prend la rude décision de quitter son lycée indien et de suivre les cours d'une école fréquentée par des Blancs. Se mettant ainsi tout le monde à dos, les siens pour qui il a trahi, les Blancs qui ne l'acceptent pas comme un des leurs.

Junior, qui expérimente l'amitié pouvant aller jusqu'à la haine avec l'Indien Rowdy, l'amour avec la Blanche Penelope, vit ses premiers émois physiques, vérifie qu'il peut être respecté, découvre une facette inconnue de sa sœur aînée, apprend une forme de philosophie avec sa grand-mère. Junior qui grandit tout en se frottant toujours aussi rudement à la vie.

"Le premier qui pleure a perdu" accroche son lecteur. Il le conduit aisément jusqu'à sa fin optimiste, non sans l'avoir intéressé à la pratique du basket et à lui en avoir donné le goût des paniers. Ce premier roman pour ados, "presque autobiographique", illustré de quelques dessins éloquents, masque la gravité de la vie des Indiens sous un ton humoristique. Pour tous dès 13 ans.


Sherman Alexie. (c) Larry D. Moore.
"J'ai toujours connu
la dernière phrase
du livre"

A sa sortie en français, en 2008, j'avais eu le plaisir de rencontrer Sherman Alexie à Bruxelles. Voici cet entretien.

Pourquoi avez-vous choisi d'écrire pour les ados?
J'ai souvent écrit à propos d'enfants et d'adolescents. Plusieurs de mes livres ont traité de choses en rapport avec le récit d'apprentissage, l'arrivée à l'âge adulte. Nous, les Indiens, comme d'autres peuples colonisés, nous arrivons seulement à l'âge adulte en tant que peuple. Il était donc quelque part naturel pour moi d'aller vers la littérature pour les jeunes. Et le fait que beaucoup de gens, des éditeurs, des libraires, des lecteurs, m'aient demandé si j'allais un jour écrire pour les enfants m'a aussi influencé. De nombreux artistes ne se soucient pas de leur public, moi si. Les liens que j'ai avec ceux qui suivent mon travail ont toujours été importants pour moi. Après des années de sollicitations, je ressentais quasiment le devoir de le faire.
Votre écriture change-t-elle selon l'âge du public auquel le livre est destiné?
Il y a moins de place dans la littérature pour les adolescents pour des effets de style, une écriture abstraite. C'est comme si on se trouvait sur une autoroute à quatre voies, alors que pour la littérature pour les adultes, on est sur une route à six voies.
Qu'y a-t-il sur les deux autres voies?
L'indulgence envers soi-même, les petites expériences qui ne mènent pas forcément quelque part. Ces deux voies supplémentaires peuvent être liées au modernisme. Positivement, je dirais que certaines de ces expériences peuvent être surprenantes.
Aviez-vous décidé d'une fin heureuse dans ce roman jeunesse?
J'ai toujours voulu une fin positive dans ce roman-ci. J'en ai toujours connu la dernière phrase. Dès le début. Elle n'est ni désespérée ni extrêmement souriante. Cela m'est apparu comme une bonne façon d'écrire la façon dont nous vivons nos existences. On attend toujours le meilleur, c'est souvent le mieux que nous puissions faire.


On peut lire un extrait de "Le premier qui pleure a perdu" ici.



mercredi 24 mai 2017

Patricia, embarquée dans le drame des migrants

Geneviève Damas.

La voilà donc publiée chez Gallimard, dans la collection "Blanche", "notre" Geneviève Damas, prix Rossel 2011 et prix des Cinq continents de la francophonie pour son premier roman, "Si tu passes la rivière" (Editions Luce Wilquin, 2011, Le Livre de poche 2014). Avec un livre superbe, "Patricia" (Gallimard, 134 pages), son troisième roman, après cinq textes de théâtre et un recueil de nouvelles, dont on se doute qu'il va rencontrer les préoccupations humanitaires de l'auteure (lire ici), mais à sa façon.

Elle-même en dit ceci: "Certains le savent, l'écriture de mon troisième roman qui traite de la migration et comment elle s'inscrit dans nos vies d'Européens a été longue, décousue, paradoxale, navrante parfois, joyeuse aussi, un peu saumâtre certains jours, décourageante, mais au total bien intéressante entre la vie, la fiction, les rencontres, les voyages... Au bout de trois ans, le voilà qui sort enfin! Ouf!"

Ouf? C'est un peu court tant ce livre frappe par sa justesse de ton et son inventivité littéraire. Bien sûr, "Patricia" traite de la migration et c'est bien. Il est basé sur des faits réels mais c'est un roman, par la forme, par l'écriture, par le choix du temps présent, celui des voix successives des trois personnages. Non un récit, plutôt un roman vrai qui donne à entendre en "je" les voix de trois êtres en prise avec la migration.

Jean Iritimbi d'abord, Centrafricain réfugié au Canada depuis dix ans déjà après avoir laissé au pays sa femme Christine et leurs deux filles, Myriam et Vanessa, tout en leur promettant qu'ils seraient bientôt réunis... Pas qu'il ait tellement belle vie dans ce pays glacial mais que faire quand on n'a pas les bons papiers? Mais bon, il a sa fierté, le Jean, et ne va pas se plaindre auprès de celles qui sont à Bangui. Il nous raconte sa rencontre avec Patricia, venue là au loin honorer une promesse, qui a l'air si seule et qu'il se met à aimer sans rien lui dire de son passé. Elle voit aussi s'ouvrir avec lui un champ de possibles et commet l'incroyable pour le ramener en Europe avec elle. A Paris. Ils y vivront ensemble jusqu'au moment où Jean apprend que sa femme et ses filles sont en route pour le rejoindre. Coincé par son mensonge par omission, que peut-il faire? Se fâcher contre Patricia, contre lui-même, tenter de jouer la montre... Le destin se montrera bien moins coopérant. Et Jean Iritimbi va devoir affronter un terrible drame.

Patricia prend alors la parole pour raconter comment elle a été embarquée par son compagnon dans son histoire à lui et dans celle de l'ensemble des migrants. Elle, la bibliothécaire appréciée, va découvrir le racisme, le rejet, les regards lourds, les sous-entendus, surtout que la jeune fille dont elle s'occupe par devers elle n'est pas toujours aussi innocente qu'elle le paraît. Cette plongée dans l'humanisme lui révèle ce qu'elle ignorait d'elle, qu'on peut donner sans nécessairement recevoir immédiatement en retour. Et l'aide à avoir enfin des certitudes.

La troisième partie fait entendre la voix de celle que Patricia veut protéger, et aussi aimer si elle se laisse faire. Une voix rarement entendue dans les histoires de migrations, qui remet à sa place les "bons Blancs qui font l'aumône", parce que le chagrin est trop lourd, qu'il est solitaire, qu'il prend du temps, qu'il prend son temps. Cet itinéraire d'une ado en détresse malgré les bonnes volontés est très subtilement raconté par Geneviève Damas, qui connaît les humains et les respecte dans toutes leurs particularités. Jusqu'à ce qui puisse briller un jour l'étincelle de l'amour partagé.

"Patricia" est un magnifique roman, tout en subtilité. La justesse de son ton appelle l'admiration. Il est la preuve que littérature et humanité peuvent aller de pair, même au présent. Un point de vue rare sur les drames, quotidiens, des migrants et une lecture revigorante.


On peut lire le début de "Patricia" ici.




mardi 23 mai 2017

Sauveur Saint-Yves, côté cour et côté jardin

Marie-Aude Murail. (c) Claude Riva.


Pendant tout un temps, on a cru que la "saison 3" de "Sauveur & Fils" (l'école des loisirs, Médium, 318 pages) était la dernière. Mais aujourd'hui Marie-Aude Murail l'a confirmé: il y aura bien une "saison 4", qui paraîtra sans doute début 2018. La romancière jeunesse y travaille en tout cas à fond. Ados et adultes sont rassurés, contents et déjà impatients. En attendant, ils ont près de mille pages de la saga romanesque à leur disposition, riches et passionnantes, sur les humains, ces drôles de gens.

Bonne nouvelle que ce tome 4, même si le problème de la fin se reposera peut-être à sa sortie. Surtout après avoir avalé la "saison 3" qui donne fort envie de connaître la suite. En effet, lire les différents épisodes de la série "Sauveur & Fils", c'est comme retrouver la famille éloignée lors d'un rassemblement familial. "Oh, tu es là aussi. Que c'est chouette de te revoir!" On connaît tout le monde et, en un seul tour de piste, on a des nouvelles de tous ces proches. Avec cette troisième saison, les habitants de la rue des Murlins (Orléans), et même les patients de Monsieur Saint-Yves, sont définitivement devenus nos lointains cousins. On tient à eux, on ne veut pas les lâcher, on ne veut pas qu'ils nous lâchent. Que me dites-vous? Ce sont des cousins de papier? Et alors, c'est bien une nouvelle preuve, si besoin était, du talent de romancière de Marie-Aude Murail.

Cette troisième saison, qui court du dimanche 18 octobre 2015 au vendredi 25 décembre 2015, se lit avec autant de plaisir, d'intérêt, de compassion et d'appétit que les précédentes (saison 1 ici, saison 2 ici). On découvre un Sauveur toujours aussi beau et portant toujours bien son prénom prometteur dans sa pratique de psychologue clinicien. On apprend que, physiquement, l'Antillais pourrait ressembler à l'acteur Sydney Poitier et qu'il aurait la voix de Nat King Cole... Mais ce Sauveur de la saison 3 se révèle aussi terriblement humain, c'est-à-dire faillible, côté cour, côté cœur. Il règne sur sa "maison masculine", qualificatif que lui donne son amoureuse Louise, la mère d'Alice et Paul, l'ex de Jérôme aujourd'hui en couple avec Pimprenelle. Elle n'a pas tort: la maison accueille, outre Sauveur, Lazare son fils de 9 ans maintenant, Gabin, son fils adoptif de quasi 17 ans, Jovo, un SDF de plus de 80 ans, ancien de la Légion étrangère qui habite désormais là aussi, sans oublier Paul, son fils à elle, l'inséparable de Lazare. Cela fait beaucoup de garçons et peu de place pour elle. Car Alice, sa fille, est peu preneuse des week-ends là, à l'exception des crêpes du dimanche. Au début de la saison en tout cas, elle changera d'avis plus tard.

Les patients défilent toujours dans le cabinet du psychologue. On a également plaisir à les retrouver. Voir que certains vont mieux, que d'autres cherchent toujours leur voie, que d'autres encore se sont ajoutés, de tous les âges. Chacun d'eux est présent physiquement, détaillé dans sa souffrance, suivi dans sa réflexion. Chacun d'eux paraît vrai. Et à découvrir leurs comportements, on pense souvent "Chapeau, les enfants!" Ils vont bougrement évoluer dans cette saison, que ce soit Ella/Elliott et ses questions d'identité sexuelle qui vont entraîner du cyberharcèlement, Samuel qui a retrouvé son père musicien, la mère de Gabin, hospitalisée pour schizophrénie, Gabin lui-même qui passe ses nuits en jeux vidéos, Blandine et sa sœur Margaux qui ont des mots qu'on pourrait appliquer à de nombreux protagonistes du livre: "Moi, je pense qu'on se soigne, Margaux et moi, mais c'est nos parents qui sont malades." De nouvelles têtes aussi, patients de Sauveur ou non, comme M. Kermartin qui se croit espionné par ses voisins, la petite Maïlys de 4 ans qui tente de capter l'attention de sa maman quelques instants, M. Wiener, le père de Samuel, Nanou, la mère de Louise, la famille Gonzales...

Mais qu'on imagine pas qu'on ne va pas quitter le cabinet de consultation, côté jardin. Bien sûr que non, toute une vie se déroule côté cour, avec ses surprises, ses joies, ses difficultés, ses erreurs, ses drames. Comme celui du Bataclan, le funeste 13 novembre 2015, dont on se doutait depuis la "saison 2" qu'il serait présent dans les pages. Gabin avait en effet le projet de se rendre au concert des Death Metals avec un copain. Il ira, quittant Orléans pour Paris cette journée-là. Marie-Aude Murail traite admirablement ce sujet sensible, sans rien gommer de la panique et de l'angoisse que les attaques ont créées dans la capitale et ailleurs mais en naviguant adroitement avec ce que les lecteurs en savent. C'est évidemment un des sujets discutés en consultation mais aussi un élément du roman.

En parallèle à tout cela, Lazare grandit à toute vitesse et Sauveur s'interroge sur son métier et sa vie. Une saison dense donc, mais non dénuée de rires, de rebondissements et de bons moments, dont l'arrivée de la télé et l'incroyable jour de Noël final! D'autres thématiques étant apparues dans la "saison 3", il est presque inutile qu'on est fin prêt pour la "saison 4"!





lundi 22 mai 2017

L'Irlandaise Maggie O'Farrell à son meilleur

Maggie O'Farrell. (c) Ben Gold.

Les voies du Seigneur sont impénétrables, dit-on. Celles de l'amour aussi, surtout quand elles sont orchestrées par une orfèvre telle que Maggie O'Farrell. On savait l'Irlandaise diablement forte à construire ses romans, mais le dernier paru, son septième, "Assez de bleu dans le ciel" ("This must be the place", traduit de l'anglais (Irlande) par Sarah Tardy, Belfond, 478 pages), pulvérise sa virtuosité. Des héros formidables et une construction plus qu'habile font de ce livre sur l'amour et ses détours son meilleur - jusqu'à présent.

Il y a longtemps qu'un roman ne m'avait pas emballée de la sorte. Il m'a portée! Bien sûr, je ne lis pas tout ceux qui sortent et j'en ai sans doute raté de très bons. Mais parmi ceux qui me sont passés entre les pattes, "Assez de bleu dans le ciel" me laissera un souvenir impérissable. Par son histoire et par son écriture, travaillée, libre et inventive. Il y est question de Daniel, un Américain habitant en Irlande avec sa deuxième épouse, Claudette, une ancienne star de cinéma qui a tout planté là pour vivre loin de la célébrité. Autour d'eux gravitent une nuée de personnages extrêmement présents lors de leurs interventions, hier, avant-hier ou aujourd'hui. Résumer les choses ainsi serait injuste pour le talent de Maggie O'Farrell qui a choisi de donner la parole à ses différents protagonistes à différents moments de l'histoire, complexe mais toute en nuances - chaque intervention est titrée, signée, localisée et datée. Un ping-pong dans le temps et entre les gens extrêmement captivant où le moindre détail est étudié.

Ah, elle nous gâte, la romancière, et rien n'est à redire dans ces quasi cinq cents pages prenantes, traduites avec fluidité. Qui sont Daniel et Claudette, ces deux que rien n'amenait à se croiser un jour? Quels sont leurs fantômes, leurs secrets, leurs espoirs, leurs rêves? Quelles peines portent-ils chacun, perceptibles par leurs enfants, ceux qu'ils ont eus séparément et ceux qu'ils ont ensemble? Quels démons fuient-ils? Le présent peut-il chasser le passé? Un temps sans doute, jusqu'à ce que ce dernier vienne se rappeler au bon souvenir. C'est ce qui est arrivé à Daniel. En chemin pour l'aéroport et les Etats-Unis où il se rend à l'anniversaire de son père, il apprend par la radio de l'auto le décès de Nicola, son premier amour...

Une scène initiale sur laquelle va se greffer une formidable saga dans le temps et le monde, rendant chaque personnage avec justesse et sans jamais le juger. Orchestrant un chassé-croisé palpitant et émouvant. La radiographie du mariage de Daniel et Claudette s'avère aussi riche de découvertes pour les créatures de Maggie O'Farrell que pour le lecteur lui-même. Pas question de la restreindre à un résumé des faits, surtout qu'ils ne nous sont pas présentés dans l'ordre chronologique. Ce serait retirer la virtuosité d'un texte qui se découvre avec enchantement dans son dédale! Quel talent! La romancière mène son petit monde de main de maître, scrutant la blancheur et la noirceur des êtres sans jamais les juger mais en les accompagnant dans leur chemin, même escarpé. Les voies de l'être humain seraient-elles impénétrables? Elles sont en tout cas habilement démontées dans un roman intense, somptueusement écrit, dont on savoure chaque ligne.


On peut lire le début de "Assez de bleu dans le ciel" ici.


A noter une nouvelle édition du premier roman de Maggie O'Farrell, "Quand tu es parti" (traduit de l'anglais (Irlande) par Marianne Véron, Belfond, 384 pages, 2000, 2017, extrait en ligne ici).





Pour mieux comprendre l'art de la romancière, ce texte, provenant du site des éditions Belfond. C'est exactement ça, et particulièrement vrai pour son dernier roman en date, en lice pour le prix Costa 2017, faire disparaître les échafaudages.

UNE JOURNÉE DANS LA PEAU DE MAGGIE O'FARRELL

La plupart du temps, les écrivains ont des idées quand ils ne sont pas à leurs bureaux, quand ils regardent ailleurs, quand ils sont pris dans le tourbillon du quotidien. La vaisselle, la lessive, les allers-retours pour l'école, les grands débats avec les enfants pour savoir si, oui ou non, il est nécessaire de porter un manteau en décembre…
C'est, en tout cas, ce que j'essaie de me dire. L'idée qu'il y a un "jour d'écriture" me fait rire, et me rend presque hystérique. Vivre avec des enfants empêche une telle routine. La semaine dernière, par exemple, mes "matinées d'écriture" étaient interrompues voire balayées par les déboires de santé de mon chat; ma fille, dessinant sur mes notes; un enfant malade renvoyé de l'école; des allers-retours pour des répétitions.
Les livres sont écrits envers et contre tout… J'écris en marge et je l'ai toujours fait. J'ai rédigé mes deux premiers romans alors que je travaillais à plein temps; le troisième dans un étrange espace-temps, après ma démission et avant l'arrivée de mes enfants. Ensuite, mon fils est né et je me suis découvert des talents cachés, comme jongler avec un stylo et un bloc-notes alors que je donnais le sein, trouver une table de café qui puisse accueillir une poussette et un ordinateur, divertir un bambin tout en donnant un coup de téléphone important.
Ecrire en marge me convient. Je crois vraiment qu'un livre a son propre moteur, toujours en marche, quelque part, dans notre esprit. Alors que j'étais en train de venir à bout de la dernière version de mon nouveau roman, "Assez de bleu dans le ciel", j'ai remarqué que j'avais utilisé le mot "pénombre" deux fois. Très ennuyeux. "Pénombre" est très beau, mais vous ne pouvez pas abuser de ce terme, pas même dans un roman de 130.000 mots. J'ai donc passé mes journées à tenter de trouver des synonymes. "Halo", "crépuscule", "auréole", "voile"? Et puis un de mes enfants a été malade et alors que j'étais en train de nettoyer les dégâts au beau milieu de la nuit, le mot "couronne" m'est apparu. "Couronne", j'ai pensé, avec soulagement, avec joie, et, satisfaite, j'ai fourré tout le linge dans la machine.
Il n'y a rien de plus dangereux pour les bons écrivains que d'avoir trop de temps, trop de liberté. On a besoin de ce système de "filtration", qui nous empêche d'être à notre travail. Vous devez vous mettre à votre clavier avec envie. Il faut s'asseoir à son bureau en souhaitant démêler tout ce à quoi on a réfléchi, toutes ces solutions, tous ces changements.
Les enfants sont de très bons éditeurs, alors, non, ils ne balayent pas un manuscrit stylo rouge à la main, mais ils occupent tellement votre temps et votre esprit, que seuls les mots qui en valent la peine atterriront sur la page…
Ils ont également l'art de vous tirer de votre monde imaginaire, de vous forcer à revenir à la vie. Les enfants n'ont que faire du nombre de mots, des métaphores risquées, des casse-têtes lexicaux, des personnages qui n'en font qu'à leur tête… Peins-moi un nid. Aide-moi à trouver un costume de dragon. Voilà ce qu'ils réclament.
Je réécris très fréquemment mes romans. Je ne fais pas vraiment de plan, mais j'aime façonner  mes textes au fur et à mesure de l'écriture. Dans les années 1990, j'ai assisté à des cours de poésie donnés par le poète irlando-américain Michael Donaghy. Il me livra deux conseils qui me sont très précieux. Le premier: soigner chaque mot. Le second: vous aurez besoin d'"échafaudages" pour bâtir le cœur de votre texte, mais n'oubliez pas de les enlever à la fin.
Quand vous faites des coupes dans votre roman, et que vous considérez certains paragraphes comme des parties nécessaires, mais amovibles d'un tout, c'est une grande source de réconfort. Mais il est difficile de déterminer quels sont les paragraphes qui relèvent de l'"échafaudage" et quels sont ceux qui relèvent des fondations. On peut prendre l'un pour l'autre… Mais je me dis que c'est la raison pour laquelle on écrit plusieurs versions.
Source : https://www.theguardian.com/books/2016/dec/17/my-writing-day-maggie-o-farrell, extraits




vendredi 19 mai 2017

Anne Leloup, éditrice chez Esperluète et artiste


Anne Leloup.
Après plus de vingt ans d'existence, Esperluète éditions a décidé de se faire mieux connaître du public. Disons plutôt de se faire connaître d'un public élargi car quel amateur de littérature ignore-t-il la maison créée par Anne Leloup - assistée depuis quelques années par Charlotte Guisset -, basée à Noville-sur-Mehaigne (pour les non-Belges et les nuls en géo, c'est dans la province de Namur) mais présente à de nombreux marchés et foires du livre.
Se faire aussi mieux connaître du public international puisque la diffusion en France est désormais confiée aux Belles Lettres, ce qui permet de toucher aussi la Suisse et le Canada.

Esperluète, une maison d'édition dont le logo est un signe typographique afin de signifier le lien entre écrivains et plasticiens (quasi cent cinquante auteurs publiés) et aussi le lien entre le livre et son lecteur (expositions thématiques, rencontres littéraires, lectures musicales, animations...).

Une maison d'édition qui vit sa vie au rythme de dix publications en moyenne par an, apparaissant dans trois catalogues (texte, image, autre).
Soit
  • Collections Littéraires: "En toutes lettres", "L'Estran", "Cahiers" et "Hh istoires" (et "Orbe" à la rentrée)
  • Collections Imagées: "Hors-formats", "Accordéons", "Albums " et "Livres-jeux"
  • Collections En marge: "[dans l'atelier]" et "Hors-Collections"

Une maison d'édition belge et indépendante, membre du groupe des Editeurs Associés (voir ici), qui a notamment repris en février de cette année l'ex-librairie Corti à Paris, en face du Jardin du Luxembourg.

Pour retrouver le catalogue actuel, c'est ici. Tout complet, tout bien fait. Mais il y a aussi les sorties du mois de mai, à savoir une réédition et deux nouveautés.


Un grand amour
Nicole Malinconi 
récit
Esperluète
collection "En toutes lettres"
52 pages, 2015, 2017

La voix et la pensée de Theresa Stangl, la veuve de Franz Stangl, l'ex-commandant du camp d'extermination de Treblinka, après la mort de son mari en 1971.


Chevaux de guerre
poème d'Albane Gellé
accompagné de peintures d'Alexandra Duprez
Esperluète
collection "L'Estran"
48 pages, 2017

Si on sait que la vie d'Albane Gellé tourne autour de la littérature et surtout de la poésie ("Où que j'aille", avec Anne Leloup, Esperluète, 2014), on sait moins qu'elle élève des chevaux chez elle. Elle consacre un délicat et vibrant poème à ceux qui ont servi pendant la guerre 14-18. Ces "chevaux de guerre" qui ont quitté leurs fermes, leurs chemins ou leurs forêts pour entrer dans un conflit innommable. Qui ont troqué le front contre leur maison. Qui ont rencontré d'autres hommes que les leurs. Qui ont accompagné, servi de bouclier, qui ont henni, qui ont marché, qui sont morts, comme souvent leurs cavaliers. Qui ont vécu avec ces derniers le meilleur comme le pire.

Peinture d'Alexandra Duprez (c) Esperluète.

Un texte magnifique, entre vérité et émotion, écrit en regardant des cartes postales de la Première Guerre mondiale, et qui est accompagné d'expressives peintures d'Alexandra Duprez ("Les Cerfs", roman de Veronika Mabardi, Esperluète, 2014, "La petite sirène", conte de Myriam Mallié, Esperluète, 2007)

Peinture d'Alexandra Duprez (c) Esperluète.


Tout amateur de littérature de jeunesse aura aussi une pensée pour le très beau roman pour ados, le premier, de Michael Morpurgo, "Cheval de guerre" ("War Horse", 1982, traduit de l'anglais par André Dupuis, Gallimard Jeunesse, 1984, 2004, 2012), où Joey, cheval de ferme, devient cheval de guerre en 1914.



La Théo des fleuves
roman de Jean Marc Turine
Esperluète
collection "En toutes lettres"
224 pages, 2017

Les souvenirs de la vieille Théodora, enfant du fleuve, née Rom. "Ce roman, j'ai mis vingt ans pour l'écrire", expliquait l'autre jour Jean Marc Turine dans les salons de Passa Porta. "C'est un hommage aux Tziganes et aux Roms, un hommage et un cri d'amour à ces personnes que j'adore. Mon roman traverse tout le XXe siècle et notamment le génocide durant la Deuxième Guerre mondiale. Un génocide qui n'est toujours pas reconnu aujourd'hui, alors que ses proportions sont identiques à celle du massacre des Juifs. En 1987, alors que je faisais un film sur les rescapés des camps nazis, ce sont eux qui m'ont parlé de la situation des Tziganes dans ces camps. Ils sont un peuple sans littérature mais non sans oralité, un peuple sans frontière et pas nomade comme on aime le dire. Je dénonce aussi dans mon livre les conditions de vie des Roms qu'on voit dans nos rues. Et comme toujours, je fais des clins d’œil à mes autres livres, comme "Foudrol" (Esperluète, 2005), sur la Première Guerre mondiale."


Et pour mieux connaître Anne Leloup éditrice, rendez-vous avec Anne Leloup artiste. A l'occasion par exemple de la sortie toute récente, en mars, du livre "Trouvé par terre (notes d'atelier)" (Esperluète, collection [dans l'atelier], 64 pages), réunissant des textes et des œuvres récentes. Un travail personnel de recherche qu'Anne Leloup accomplit en parallèle de ses activités d'éditrice à découvrir absolument. On réalise combien ses différents supports accueillent la continuité de ses explorations sur le trait et la couleur.

Ou du texte. "Je vois le ciel, et la terre, et les arbres, les voitures, la route, les maisons", écrit ainsi Anne Leloup. "Je ne les dessine pas. Je ne vois pas les formes qui m'habitent. Je vois le contour des choses, leur poids, leur mesure. Je vois le temps qui passe, qui use. Je vois les enfants qui courent et la femme qui marche. Je vois les hommes qui vivent, respirent, meurent au moment où je dessine. Et puis, je ne vois plus rien, ne sens rien et commence à suivre le trait qui chemine puis s'arrête."

Des notes d'atelier qui proviennent des carnets de croquis qui accompagnent l'artiste. Petits cailloux blancs dont les mots éclairent un travail ou interrogent son sens.

Les œuvres réunies, plutôt abstraites, posent discrètement la question du dessin et de sa représentation., les blancs, les vides, les passages, mais aussi les visages et les végétaux.

"Dedans", litho. (c) Esperluète.

"Double rouge", litho. (c) Esperluète.

"Feuilles", litho. (c) Esperluète.

"Figuiers", litho. (c) Esperluète.

"Tulipes", litho. (c) Esperluète.



mardi 16 mai 2017

Cherchons la lumière, devenons des lucioles!

Image de couverture d'Amélie Jackowski pour "Des lucioles". (c) L'initiale.

S'il y a bien un philosophe contemporain qui pense les images, même qui pense par les images, c'est Georges Didi-Huberman. Son abondante bibliographie en témoigne, une cinquantaine d'essais sur l'art et la littérature publiés principalement aux Editions de Minuit, tout comme les nombreux articles qui lui sont consacrés.

Paradoxalement, ses mots à lui n'avaient pas été mis en images. C'est aujourd'hui chose faite avec le délicieux album jeunesse "Des lucioles", où "Amélie Jackowski dessine Georges Didi-Huberman" (L'initiale, collection "Philosophie et citoyenneté", 24 pages). Un album carré composé de doubles pages, des peintures à bord perdu rendant superbement l'ambiance de nuit bleue.

La bonne idée de cet album destiné à la jeunesse (mais pas que, selon moi) est d'avoir repris directement des extraits d'un essai de Georges Didi-Huberman, "Survivance des Lucioles" (Editions de Minuit, 2009) et de ne pas avoir paraphrasé sa pensée. Lui-même semble convaincu par cette première incursion en littérature jeunesse. Il écrit à l'éditrice: "C'est très émouvant pour moi... Notamment que l'on puisse écrire le mot "pessimisme" dans un livre pour enfants, fût-ce pour le critiquer par de la poésie visuelle... Magnifique! Un très grand merci à vous et à Amélie!"

"Amélie" étant bien entendu l'illustratrice Amélie Jackowski, forte d'une vingtaine d'albums jeunesse dont le très beau "Derrière la brume" avec Ramona Badescu (Albin Michel Jeunesse, lire ici). Elle a imaginé en couverture une barque, forte de cinq passagers peu communs, quatre enfants dont un se masque d'une tête d'oiseau et la lune. On va les suivre dans leur équipée nocturne, sur terre et sur l'eau. Pour les éclairer dans la nuit bleue, des étoiles et des lanternes japonaises. Plus loin, d'autres modes de lumière apparaîtront, un phare, des guirlandes, une lampe-torche, des allumettes, des feux d'artifice, sans oublier les lucioles.

Où vont les images qu'on ne voit plus? (c) L'initiale.

Les mots de Georges Didi-Huberman courent en bas des dessins, à raison d'une ligne par double page. Ils parlent de vision proche ou lointaine. D'images qui, comme des lucioles, finissent par disparaître de notre vue mais sont peut-être vues, ailleurs, par d'autres... De désirs, de joie et d'innocence, de récits à transmettre. D'hier, d'aujourd'hui et de demain.
Amélie Jackowski construit ses images en séquences poétiques qui s'enchaînent jusqu'à boucler leur boucle, suivant le texte mais aussi le prolongeant et le propulsant dans l'imagination, mariant les ténèbres et les lueurs.

"La danse des lucioles", écrit le philosophe, "ce moment de grâce qui résiste au monde de la terreur, est la chose la plus fugace, la plus fragile qui soit." Avant de poursuivre: "Il y a tout lieu d'être pessimiste, mais il est d'autant plus nécessaire d'ouvrir les yeux dans la nuit, de se déplacer sans relâche, de se remettre en quête des lucioles." Et d'inviter chacun à devenir une luciole.

Voilà un album magnifique qui berce et porte et soulève. Il ne chasse pas le noir mais le cherche pour mieux y faire briller la lumière d'une maison accueillante et sereine. "Des lucioles" est un livre dont il faut laisser infuser tranquillement le texte, les images et le rapport texte-images. Le résultat s'annonce prometteur!

Pour feuilleter "Des lucioles" en ligne, c'est ici.









vendredi 12 mai 2017

Revoilà le "Trombone illustré"!

Revoilà le "Trombone illustré"! En supplément de la revue 64_page.

Retrouver le "Trombone illustré" est toujours un plaisir même si c'est en même temps me rappeler que je l'ai vu naître en mars 1977, vivre pendant sept mois et trente-et-un numéros et s'arrêter... Un hebdo clandestin au journal "Spirou", inouï  à son époque et dans son contexte, le groupe Dupuis. Un concentré d'énergie, de rires, de grognes et de poésie qui a fait bouger les lignes de la bande dessinée d'alors - jusqu'à aujourd'hui. C'était il y a tout juste quarante ans. Ce moment d'auto-apitoiement passé, voilà où je l'ai retrouvé aujourd'hui. Dans le numéro 10 de la "revue de récits graphiques 64_page" (180° éditions, 64 pages, 9,5 euros) qu'organise Philippe Decloux, dont il constitue un supplément gratuit.

Comme si les jeunes auteurs de "64_page" avaient retrouvé la cave de la rue de Livourne à Bruxelles où André Franquin et Yvan Delporte avaient réalisé le "Trombone illustré". En tout cas son esprit. Bandes dessinées, dessins, textes dont deux d'Yvan Delporte, rubriques, brèves, "Ne dites pas mais dites", autant d'idées 100 % noires, qu'assument, dans l'esprit des pères fondateurs, Fred Jannin (qui a débuté au "Trombone"), Karine Welschen, Mathilde Brosset, Adley, Pluie acide, Marianne Pierre, Quentin Lefebvre, Thomas Vermeire, Philippe Decloux, Dan Fano, Patrice Réglat-Vizzavona, Basti DSK, Remedium, Pierre Mercier, Benedetta Frezzotti, Romane Armand, Angela Verdejo, Dake25, Cossu, Jay Aël, Matthias Decloux, Robert Nahum, Olivier Grenson, Xavier Zeegers, Vincent Baudoux.

Un numéro collector à voir! Un hommage clandestin qui se glisse dans une revue qui en est à son dixième numéro et qui tient son nom du lieu où elle a été conçue, un bistrot sis au 64 de la rue du Page à Ixelles.


Pour le reste, on trouve au sommaire du numéro 10 de "64_page":

- des bandes dessinées de jeunes auteurs
  • "A en perdre la tête", d'Antoine Breda 
  • "Lost in translation" ou les aventures d'éducateurs italiens bien intentionnés, de Benedetta Frezzotti, originaire de Bologne 
  • "Comment rendre le monde meilleur?", un documentaire sur la pollution de l'air, de Quentin Lefebvre, nouvel Oncle Paul 
  • "La négritude" ou le vécu des hommes noirs en Europe, de Frédéric Marschall 
  • "Sissi à bicyclette", l'évolution culturelle dans l'Egypte de Sissi, de Philippe Baumann-Debuhme
- des rencontres avec les bien connus et aimés Etienne Davodeau et Dominique Goblet

- un hommage aux soixante ans de Gaston Lagaffe et aux quarante ans du "Trombone illustré", et à leur créateur, le génial André Franquin

- d'autres choses encore (voir ici).

En apéritif, le sommaire du numéro 11, à paraître en juin.
Oui, Yslaire et Tomi Ungerer!






jeudi 11 mai 2017

It was a wonderful day!

Accueil des visiteurs à La Vallée.

Hier, mercredi 10 mai, se tenait à La Vallée à Molenbeek (Bruxelles) la première vente solidaire et festive d'œuvres d'artistes jeunesse du monde entier au profit des réfugiés aidés par la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés de Belgique (asbl "Refugees Welcome"). C'était "you're wonderful, you're welcome", journée solidaire avec les personnes exilées (lire ici).

Ce fut vraiment wonderful. Et tout le monde s'y est senti welcome. Une ambiance réjouissante, bonne humeur, rires, conversations, rencontres entre artistes, bénévoles de la Plateforme, réfugiés et public, soleil, sourires, découvertes mutuelles, bonnes choses à manger, organisation impeccable. Des enfants partout, courant, jouant, dessinant... Des fils de laines de couleurs en chapiteau de cirque à l'extérieur. A l'intérieur, l'exposition des 400 dessins et plus, offerts par 145 artistes. Une longue fresque où chaque nouveau venu inscrivait son prénom, l'heure de son arrivée et sa provenance. Dans un lieu que beaucoup de personnes découvraient avec enchantement.

Le tout en présence de mineurs non accompagnés (MENA) dont s'occupe l'asbl Synergie 14, de réfugiés mineurs et de leurs tuteurs privés, de participants aux ateliers artistiques mis sur pied par Thisou à Saint-Luc, de bénévoles de la plateforme, de personnes qui y sont passées, d'élèves des cours de langue, de curieux et de militants solidaires.

L'après-midi a super vite passé et l'heure de la vente des dessins originaux est arrivée, marquée par une séance de hip-hop. Les œuvres étaient regroupées en série sur les murs, affichant leur pastille bleue, jaune ou verte selon le prix demandé (25, 50 ou 100 €). Il s'agissait d'indiquer à un des nombreux bénévoles en place le dessin choisi pour qu'il le détache du mur et vous le confie afin d'aller le payer à la caisse.

Wonderful, wonderful, wonderful, une recette de 17.000 € a été comptabilisée, qui sera remise à l'asbl Refugees Welcome. La Plateforme citoyenne pourra ainsi poursuivre son travail de solidarité dans toutes ses facettes. Générosité des artistes, générosité du public.

Quelques images d'un 10 mai inoubliable

L'exposition des dessins par groupes.

La fresque des enfants.


Atelier enfants.
Atelier enfants.











Rencontres dans la cour de La Vallée.

Hip-hop avant l'ouverture de la vente.

La caisse.

You're wonderful, you're welcome.


lundi 8 mai 2017

400 dessins originaux en vente pour les réfugiés!

"you're wonderful, you're welcome", dessin de Kitty Crowther.

Ce mercredi 10 mai aura lieu à Bruxelles (Molenbeek, La Vallée) au profit des réfugiés de Belgique une grande vente festive de dessins offerts par des illustrateurs jeunesse du monde entier.

Ce sera "you're wonderful, you're welcome", journée solidaire avec les personnes exilées.

L'idée s'inscrit dans celle que défend le mouvement français Encrages, initié par Judith Gheyfier et des illustratrices jeunesse désireuses de soutenir pratiquement les réfugiés. On se rappellera qu'une vente solidaire d'illustrations organisée à Paris en décembre dernier a réuni 18.000 € en un soir au profit de différentes ONG parisiennes.

Depuis, Encrages a essaimé. D'autres ventes ont été organisées en France, à Lyon, à Rennes. Et en voici une en Belgique, mise en place et coordonnée par Kitty Crowther (auteure-illustratrice), Carole Saturno (auteure), Nina Bosco (artiste plasticienne) et Anne Desclée (scénographe).

Emballage.
Déballage.












En février, elles ont sollicité leurs amis illustrateurs afin qu'ils offrent un (ou des) dessin(s) à vendre mercredi au profit de l'asbl "Refugees welcome", association belge d'aide aux réfugiés. Tout au long du printemps, les enveloppes joliment garnies ont afflué. Dessins originaux, gravures, sérigraphies, esquisses... Les artistes ont leur façon de se montrer solidaires des migrants. Aujourd'hui, les initiatrices de la journée règlent les derniers points du programme du mercredi 10 mai. Et surtout, elles emballent sous plastique les 400 dessins, ou tirages signés, qui leurs sont parvenus en quelques mois. QUATRE CENTS DESSINS! Et des beaux! Et des fameux! Qui seront vendus à 25, 50 ou 100 euros (paiement comptant ou bancontact)! C'est dingue et à ne pas manquer.

"you're wonderful, you're welcome" sera aussi l'occasion, au-delà de la vente solidaire, de partages et de rencontres entre public, artistes, militants associatifs, réfugiés.

Programme

  • 15 heures, ouverture des portes au public: exposition éphémère des œuvres qui seront vendues à partir de 18 heures au bénéfice de l'asbl Refugees Welcome, exposition de travaux réalisés par Thisou Dartois et ses étudiants en illustration de l'ESA St-Luc Bruxelles avec des réfugiés.
  • De 15 à 18 heures: ateliers pour petits et grands organisés par les artistes (Kitty Crowther, Thomas Lavachery, Roland Garrigue, Jeanne Ashbé, Virginie Pfeiffer, Anne Desclée, Nina Cosco, Hanna Ilczyszyn, Chloé Perarnau, Fanny Dreyer et Sarah Cheveau du collectif Cuistax...), soit des fresques murales, des lectures chuchotées à deux, des pop-up, de la sérigraphie, un marathon de dessins, des portraits, des mandalas... et même du tressage de cheveux par Sarah, arrivée du Nigéria il y a deux ans.
  • A 18 heures: interlude avec un concert de Clare Louise puis le danseur de hip-hop Elias Bauthier. Goûter et apéro solidaires jusqu’à épuisement des marmites!
  • Le tout en présence de représentants de Refugees Welcome, de tuteurs de mineurs isolés, de jeunes mineurs hébergés par Synergie 14, de personnes exilées...
  • Ensuite, place à la vente solidaire. Pour 25, 50 ou 100 €, vous pouvez repartir avec un dessin original ou un tirage signé!

Les bénéfices de la vente iront intégralement à l'asbl "Refugees Welcome" (voir ici). L'association se compose aujourd'hui  de dix-neuf coordinateurs bénévoles, trois psychologues, un réseau de 1500 bénévoles. Elle s'occupe de 200 à 300 personnes exilées par semaine et suit environ 100 dossiers par mois.

Rappelons que la "Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés" a été créée en septembre 2015 au parc Maximilien (face à la gare du Nord à Bruxelles), dans l'urgence, devant l'arrivée massive de réfugiés afghans, irakiens et syriens à Bruxelles. Elle a désormais des locaux à Jette où elle déploie son engagement tous azimuts, à la fois dans l'urgence et sur le long terme: accompagnement administratif et social, cours de français et de néerlandais, cours d'arabe pour les travailleurs sociaux, aide aux devoirs, école Maximilien pour les petits, espace femmes et puériculture, dons de vêtements, kits hygiène, réseau Be my buddy, cybercafé...

Les "Wonderful artists" ayant offert un ou des dessins (ou tirages signés)



Une petite mise en bouche


Amélie Jacowski.

Anne Brouillard.

Arno Célérier.

Beatrice Alemagna.

Benjamin Chaud.

Catharina Valckx.

Christian Voltz.

Christophe Poot.

Claude Ponti.

Frédérique Bertrand.

Janik Coat.

Jean-Luc Englebert.

Kitty Crowther.

Marie Wabbes.

Natali Fortier.

Thomas Lavachery.

Plein d'autres images sur la page Facebook "you're wonderful, you're welcome" (ici). Et bien sûr, l'ensemble à découvrir sur place mercredi après-midi.

Infos pratiques

La Vallée
Rue Adolphe Lavallée 39, 1080 Bruxelles – Molenbeek
Tram / Bus / Métro: Arrêt Ribaucourt, Sainctelette, Yser
Parking gratuit à partir de 17 heures à la Fédération Wallonie-Bruxelles au 27-29 rue Adolphe Lavallée (juste à côté).
Sur Facebook, c'est ici.